Nos pratiques culinaires ont énormément changé au cours des dernières décennies. Notre accès à une alimentation diversifiée, comprenant maintenant des ingrédients de partout dans le monde, a profondément affecté notre façon de nous nourrir quotidiennement.
Au Québec, en deux générations à peine, nous sommes passés d’une diète entièrement locale et saisonnière, à une diète majoritairement importée. D’une assiette typique de porc, de navets et de choux, nous mangeons maintenant des assiettes remplies de fruits du jacquier d’Hawaï, de quinoa du sud et d’épices internationales. Le choix des ingrédients auxquels nous avons accès a explosé; la diversité des produits que nous pouvons choisir est immense. Ces changements rapides, bien que positifs pour la créativité culinaire, sont venus bouleverser l’essence même de nos habitudes alimentaires, nous laissant déboussolés quant aux pratiques à adopter. En quoi consiste maintenant la culture culinaire québécoise? Dans cette question se cache l’essence d’un enjeu culturel et environnemental profond.
Bien qu’on ne pourrait jamais blâmer l’envie de n’importe qui de goûter des produits d’ailleurs, qui nous offrent des saveurs uniques et diversifiées, un changement de culture culinaire me semble nécessaire. Le problème n’est pas l’accès à des produits diversifiés en soi, mais plutôt les habitudes de consommation que nous adoptons face à l’accessibilité de ces produits. Sans bannir ces denrées de notre alimentation complètement, il m’apparaît nécessaire de progresser vers un panier alimentaire principalement constitué d’ingrédients locaux. Des acteurs du milieu alimentaire québécois, comme des chefs cuisiniers, des restaurateurs et restauratrices et des fermiers et fermières promouvoient ce mouvement vers une culture culinaire propre à notre terroir. Avec beaucoup d’engagement et de créativité, ces gens passionnés tentent de faire réaliser l’importance de ces changements qui doivent s’opérer en mettant en valeur la qualité des produits d’ici. Ce mouvement est motivé par des raisons environnementales évidentes -nommons par exemple la diminution des km parcourus aux fins du transports des aliments, un meilleur contrôle des pratiques agricoles utilisées-, mais aussi, par un désir profond de faire connaître la qualité exceptionnelle des saveurs d’ici et de les faire connaître à leur juste valeur.
Une réelle valorisation des produits locaux passe par un changement de culture et de pratiques sociales. Et si on s’inspirait de la culture italienne, dans laquelle chaque restaurant de village sert des plats dans lesquels se trouvent les tomates produites dans cette même localité? Si ce ne sont pas les tomates du jardin sur place, ce sont celles du voisin d’à côté qui seront servies à tout coup dans leurs assiettes. Pourquoi? Parce qu’il n’y aura jamais de meilleures tomates que celles fraîchement cueillies. J’aimerais que ce qui nous rende le plus fiers soit de servir un plat cuisiné de nos propres poivrons colorés, de nos concombres croquants, des oeufs de nos poules et du miel sucré de nos abeilles. Que le mot local devienne irrévocablement un gage de fierté, et surtout de qualité.
Avec le plus grand réseau de fermiers au monde, des produits variés et savoureux malgré des conditions hivernales interminables chaque année, il y a de quoi célébrer la force de notre système alimentaire.
Santé aux producteurs et productrices d’ici!